Sortie de route : remise en question sur fond de BD

En ce jour joyeux de mardi gras, je ne vous parlerai pas de crêpes (elles sont déjà faites et attendent, en pile, que je m’y attaque), mais bien de bande-dessinée. Allez chercher le rapport avec la choucroute. (Mais je vous suggère de ne pas trop y perdre de temps, cela pourrait durer longtemps.) Comble du sirop d’érable dégoulinant dans les trous de la crêpe tartinée de beurre salé, d’une BD que je n’ai pas franchement aimé. Disons que j’ai dû passer à côté. Voilà. Et pas qu’un peu. Il s’agit de Sortie de route, de Didier Tronchet. Nom que je connaissais mais que je n’avais jamais eu entre les mains (sans jeu de mots graveleux, je vous prie). Donc découverte. Et je vais encore passer pour la mauvaise coucheuse et qui en plus de cela n’y connaît que couic, peau de banane, en BD mais se permet néanmoins de dire qu’elle a pas aimé. Quelle morue. Oui, je sais. Allez, je vous en parle quand même un petit peu ! (Oui, car, je me suis aperçue que mon avis n'était pas unanime et que certains ont même grandement aimé Sortie de route. Preuve que je suis une satanée truie.) On file sur les routes de l’Ardèche.

Sortie de route : une gorgée de grenadine qui se termine en dérapage incontrôlé

Régis Lemaître a une trogne un poil carrée, une espèce de coiffure à la Elvis Presley, mais, là, tout de suite, il est surtout en voiture sur les routes de campagne avec sa femme (Valérie) à ses côtés. Qui semble moyennement ravie. Et pour cause. Bien qu’étant officiellement en vacances, comme en témoigne la chemise hawaïenne (qui est en fait de Gambie) qu’il brandit à sa femme, il lui reste encore un rendez-vous professionnel à torcher. Mais, une fois ce rendez-vous, potentiel gros contrat, plié, les vacances seront là et Régis a tout prévu, tout organisé et tout compilé dans sa pochette jaune. Sauf que voilà. Valérie a oublié de prendre la pochette jaune en question. Et que (re)voilà, elle a soif. Pas grave. Régis a tout mis dans la glacière. Qui se trouve être aux abonnés absents, au même titre que la pochette jaune. Oups. Mais on ne surprend pas Régis, le roi de l’organisation comme cela ! Non ! Il dégaine son plan B : une bouteille de grenadine planquée dans la boîte à gants. Et dont il promet à sa femme qu’elle la fera revenir en enfance. C’est littéralement le cas. Il se retrouve brusquement nez-à-nez avec une Valérie de dix ans.

Sortie de route : prise de conscience en Ardèche

Voilà le point de départ de la BD Sortie de route. Après, on se doute bien que les choses vont déraper. Forcément. Car Régis Lemaire va d’abord réagir en adulte responsable, carré et rigoureux, passablement dépassé par les événements… et, forcément, tout va aller de travers. De la simple quête d’un pique-nique dans un supermarché, à une visite chez le médecin, tout dérape. La situation lui échappe d’autant plus qu’il a toujours ce rendez-vous important pour sa carrière à torcher. Mais justement, parlons-en de sa carrière. Est-ce vraiment ce qui lui fait envie dans la vie ? Car, oui, indirectement, se retrouver aux prises avec une gamine de dix ans qu’il ne connait finalement pas tant que cela va pousser Régis à se remettre en question, à interroger sa vie, son travail et son couple. En soi, c’est plutôt prometteur. Sauf que, bon, déjà, j’accroche pas franchement au graphisme stylisé de Tronchet. Mais ce n’est pas le plus embêtant, parce que voilà, il s’agit d’un univers, d’un coup de crayon auquel on finit par s’habituer. En revanche, l’intrigue ne m’a pas particulièrement emballée non plus. La relation aux parents de Valérie est expédiée en deux temps trois mouvements, sans autre explication valable (et cela aurait pourtant pu toucher une corde furieusement sensible). La relation de couple n’est pas explorée outre mesure ; on se doute que la routine a joué son rôle de petite chose malfaisante qui abîme et fait des ravages et on soupçonne également que cette journée de traverse va aider Régis et Valérie à se retrouver. Mais on n’en sait pas beaucoup plus. Alors, oui, l’escapade façon road-movie est rythmée, notamment grâce aux caprices de Valérie fillette. Mais la psychologie reste au ras des pâquerettes. Et la mayonnaise, de mon côté, reste au stade de vague soupe tachetée d’huile. Ça ne prend pas et ça me laisse même franchement perplexe. Point positif (oui ! ouiiiii !) : les couleurs franches sont incroyablement lumineuses.