La mémoire de Babel (La Passe-miroir #3) : une suite flamboyante qui revient aux sources
[Carozine dévore le roman La mémoire de Babel (La Passe-miroir #3) - Christelle DABOS - dès 13 ans]
Cela faisait des semaines que je trépignais d’impatience et que je l’attendais avec cette petite nervosité caractéristique car, oui, l’air de rien, j’avais peur d’être déçue. Mais voilà. Le Livre 3 de la Passe-miroir, La mémoire de Babel est arrivé dans ma boîte aux lettres. Vous n'imaginez même pas le saut de joie que j'ai effectué ; j'ai remonté les 3 étages comme sur un nuage (merci Gallimard Jeunesse !). Et je m’y suis plongée avec plaisir… la pointe d’appréhension s’est dissipée au fil des pages. Christelle Dabos est décidément une auteure qui sait me parler ! (Et surtout me transporter.) C’est avec le Livre 1 de la Passe-miroir, Les fiancés de l’hiver que j’étais revenue sur les terres délectables de la littérature jeunesse et je ne ne cesse de la parcourir depuis. Christelle Dabos avait également réveillé mon envie d’écrire, qui ne m’a jamais bien quittée, mais qui était en sommeil… mais ceci est une autre histoire ! Aujourd’hui, nous retrouvons donc Ophélie et son écharpe après des aventures qui se compliquaient singulièrement dans le Livre 2 de la Passe-miroir, Les disparus du Clairdelune. Prenez un pot de miel et souvenez-vous. [Achtung spoiler] Ophélie faisait son entrée officielle dans la Citacielle et devenait la liseuse de l’esprit de famille Farouk… avant que son fiancé, Thorn, ne tombe en disgrâce, ne se fasse emprisonner et, après une cérémonie éclair de mariage, ne disparaisse de sa cellule grâce à l’assimilation des pouvoirs de passe-miroir d’Ophélie. [Nous revenons à un mode sans spoiler] Vous remettez les choses en place ? On n’a plus qu’à sauter dans un miroir pour retrouver notre héroïne.
L’horloge fonçait à toute allure. C’était une immense comtoise montée sur roulettes avec un balancier qui battait puissamment les secondes. Ce n’était pas tous les jours qu’Ophélie voyait un meuble de cette stature se précipiter sur elle.
—Veuillez l’excuser, chère cousine ! s’exclama une jeune fille en tirant de toutes ses forces sur la laisse de l’horloge. Elle n’est pas si familière d’habitude. À sa décharge, maman ne la sort pas souvent. Puis-je avoir une gaufre ?
Ophélie observa prudemment l’horloge dont les roulettes continuaient de crisser sur le dallage. La mémoire de Babel (La Passe-miroir #3) - Christelle DABOS
La mémoire de Babel (La Passe-miroir #3) : quand Ophélie devient Eulalie
Tant mieux. Car nous retrouvons Ophélie sur l’arche d’Anima où elle est cloisonnée et surveillée de près par les Doyennes depuis son rapatriement de force… près de trois ans auparavant. Presque trois ans se sont écoulés sans aucune nouvelle de Thorn. Et un vide caractéristique du manque s’est confortablement installé au fin fond d’Ophélie, qui se morfond comme les pierres, tout en échafaudant une théorie à partir des souvenirs de Farouk. Heureusement, Archibald le séducteur vient la sortir de son ennui mortel… au détour d’une porte de toilettes, il la transporte dans une Rose des Vents. Et quand il lui demande où elle veut aller, Ophélie ne met que quelques secondes à répondre qu’elle doit se rendre à Babel. Et seule. Sous une nouvelle identité : Eulalie. Ophélie espère y retrouver Thorn, à qui elle avait confié les bribes de souvenirs avant leur séparation, et dont elle conserve la montre déréglée depuis. Sur cette arche déroutante, elle ne tarde pas à faire la rencontre d’Ambroise, qui la prend sous sa protection… avant qu’elle ne se décide à devenir avant-coureuse pour les esprits de famille de l’arche, Pollux et Hélène.
Ophélie serra l’écharpe contre elle, pendant qu’elle contemplait la porte qui lui faisait face. À peine Archibald l’avait-il close, sur un dernier clin d’oeil, que le scintillement lumineux s’était éteint à travers tous les interstices. Ophélie tourna le bouton de la poignée et poussa prudemment le battant : plongé dans le noir, un cagibi avait remplacé la grande rotonde de la Rose des Vents. Le passage était fermé et bien fermé.
« Je suis seule », réalisa soudain Ophélie en écarquillant les yeux sur le réduit obscur. La mémoire de Babel (La Passe-miroir #3) - Christelle DABOS
La mémoire de Babel (La Passe-miroir #3) : une suite flamboyante qui revient aux sources
L’air de rien, la puissance implacable de l’imaginaire de Christelle Dabos se met en oeuvre avec La mémoire de Babel (Livre 3, La Passe-miroir) : Ophélie débarque dans une arche surpeuplée, parsemée d’arches mineurs et de ponts enjambant le vide, et organisée d’une main de fer par les Lords de LUX qui ont instauré un Index de mots interdits, des codes vestimentaires stricts… une espèce de dictature sous couvert de bien-être sociétal. Mais là n’est pas vraiment l’intérêt de ce Livre 3 de la Passe-miroir, La mémoire de Babel. Nenni. Avec ce troisième tome, Christelle Dabos revient aux sources de sa saga : la Déchirure et la création de cette nouvelle humanité à partir des esprits de famille et des pouvoirs familiaux. Ce nouveau décor confirme la maîtrise extraordinaire de Christelle Dabos. J’ai eu un immense plaisir à retrouver cette plume déliée et alerte… et Ophélie qui trouve une telle résonance en moi. Peut-être parce qu’elle me ressemble tant. Jusqu’à son mari. La séparation de Thorn et d’Ophélie permet à La mémoire de Babel (Livre 3, La Passe-miroir) de se recentrer sur son héroïne, sa personnalité et ses choix… sa manière de grandir, aussi. Et c’est délectable. Évidemment, le troisième tome se referme sur un événement fracassant qui devrait accélérer le rythme pour le dernier volume de la saga de La Passe-miroir. Et qui nous laisse pantelant, forcément. Frustrée, ai-je envie de dire en ce qui concerne ma modeste personne. Mais revenons à nos moutons ! La mémoire de Babel (Livre 3, La Passe-miroir) reprend avec virtuosité le flambeau des deux premiers tomes, nous fait explorer une autre parcelle de cet univers foisonnant et nous transporte une nouvelle fois à des milliers de kilomètres de là, dans un monde parfait et pourtant terriblement cruel où la connaissance règne en maître… et se fait allègrement manipuler selon les besoins du moment. Donc voilà. J’ai beau avoir essayé de faire durer le plaisir, j’ai dévoré La mémoire de Babel (Livre 3, La Passe-miroir) et je suis toujours autant admirative depuis la puissance créative de Christelle Dabos, son imaginaire, ses personnages travaillés à la psychologie fine et si profondément humains. Ce troisième tome était un épanouissement et je ne doute pas que le dernier volume de cette saga merveilleuse (et, oui, incontournable) qu’est La Passe-miroir sera à la hauteur. Après tout, Christelle Dabos n’a jamais failli. Bien au contraire. Elle nous a ravis.
Recroquevillée sur elle-même, elle avait rejeté tous les draps de lit et écarquillé ses yeux myopes sur les taches de lumière qui scintillaient dans l’entrebaîllement de la moustiquaire, incapable de déterminer où commençaient les étoiles et où finissaient les lampadaires. La brise s’engouffrait par la fenêtre, diffusant dans la chambre le parfum frais des eucalyptus. Les stridulations des grillons ondulaient à la surface de la nuit.
Tac tac. tac tac. Tac tac.
Ophélie tremblait. Le soleil avait brûlé la peau de son visage ; elle se sentait pourtant glacée. Le gouffre au fond de son corps prenait cette nuit des proportions vertigineuses (…) La mémoire de Babel (La Passe-miroir #3) - Christelle DABOS
Les détails du livre
La mémoire de Babel (La Passe-miroir #3)
Auteur : Christelle DABOS
Illustrateur : Laurent GAPAILLARD
Traducteur : ?
Éditeur : Gallimard Jeunesse
Prix : 18 €
Nombre de pages : 496
Parution : 1 juin 2017
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Longtemps, je me suis couché(e) de bonne heure... pour lire. So what?!
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