Des monstres au carnaval : le retour pétaradant de la famille Mortadel

« Mardis gras, t’en vas pas, j’fais des crêpes, j’fais des crêpes ! Mardi gras, t’en vas pas, j’fais des crêpes et t’en auras… » Non, ne vous inquiétez pas, mon calendrier n’est pas resté bloqué sur la journée du beignet, mais je me suis dit que c’était une façon comme une autre d’aborder le sujet du jour (bonjour !) : le carnaval ! Et, vu les auteurs que son Marc Cantin et Isabel, je n’allais pas vous parler de la mélancolie qui s’échappe de sous les jupes dentelées disparaissant au détour d’un canal de Venise. Ça ne collait pas trop. Non, parce qu’avec Des monstres au carnaval, on est plutôt dans l’ambiance du Nord, le lancer de hareng puant en moins (ce qui me convient parfaitement, d'ailleurs). Allez, hop, on saute dans un char et on se réjouit du retour de la famille Mortadel, avec Des monstres au carnaval, car il s’agit là d’une série franchement sympathique. (Pour ceux qui roupillaient au fond de la salle, nous en sommes donc au tome 2 et le 3 est, semble-t-il, déjà dans les starting-blocks.)

—Pas du tout ! a affirmé mon père. Réfléchis... À ton avis, que fait-on dans un carnaval ?
—On danse ! s'est écrié Pépékinois en se tortillant sur son fauteuil roulant.
—On boit du sang ! a répondu ma mère avec un air affamé.
—On se déguise, j'ai dit.
—Bravo ! m'a félicité papa. Et en quoi allons-nous nous déguiser ?
—En dromadaire ! a hurlé mon grand-père. En dromadaire qui danse, qui pète et qui joue de la trompette !

Des monstres au carnaval - Marc CANTIN & Isabel

Des monstres au carnaval : la famille Mortadel vs. des humains déguisés

À Transylvania, la famille Mortadel tourne en rond et, à peine remis de leurs émotions de l’été dernier au camping qu’ils ont à nouveau la bougeotte… d’autant que Potofeu Mortadel est toujours aussi friand de découverte du monde des hommes. Et quelle meilleure saison pour les analyser sous toutes les coutures que celle du carnaval ? Potofeu Mortadel a d’ailleurs farfouillé sur Internet et a inscrit la petite famille (au grand complet) à la préparation d’un char au carnaval de Mauresque-sur-Baie. Ni une ni deux, la famille s’entasse dans le corbillard… et, après un voyage en cargo (et avoir fichu une sacrée frousse aux marins du port), les Mortadel débarquent dans le jardin de Mémé Yvonne (aussi sourde qu’une truffe planquée sous terre) et de Mathias, jeune garçon ayant procédé au recrutement de la famille Mortadel et qui ne tarde pas à soulever l’intérêt énamouré de Carniflore, soudainement passionnée par ce carnaval de Mauresque-sur-Baie. Le hic de cette belle idée pondue par Potofeu : les Mortadel risquent bien d’avoir trouvé un redoutable adversaire en la personne de Vito Magot, bagnard peu avenant qui profite, comme eux, du carnaval pour passer inaperçu.

À pein déposé sur le quai, le container occupé par les Mortadel se met à vibrer. Les portes s'ouvrent brusquement et le corbillard-car surgit. Il fonce droit devant lui, semant la panique parmi les marins. Ils courent, crient, se cachent derrière des caisses, se jettent à l'eau... et quand ils sortent la tête de leur abri ou regagnent la terre ferme, l'étrange véhicule a déjà disparu. Envolé, comme s'il s'agissait d'un mirage.

Des monstres au carnaval - Marc CANTIN & Isabel

Des monstres au carnaval : un retour en fanfare (et têtes de mort sanguinolentes) et déjanté

Je dois dire que j’ai pris beaucoup de plaisir à retrouver la famille Mortadel et les personnalités farfelues qui la composent (on s’attache à ces petites choses !) : Sangrion et son incapacité à comprendre pourquoi de vraies têtes de mort seraient moins bien pour décorer le cercueil du carnaval que des têtes en papier mâché ; Potofeu et ses sorts qui foirent lamentablement systématiquement… et mon extrême chouchou, le roi de la parole sibylline mais rarement à côté de la plaque : Pépékinois ! Bon, cette fois, ses sorties sont un peu moins hilarantes et décapantes que dans le tome précédent (Des monstres au camping, pour mémoire), mais elles n’en restent pas moins délectables, surtout quand il s’agit d’astiquer un peu son gendre (« Si tu oublies de souffler dans ta trompette, personne ne le fera à ta place »). D’avoir ajouté le personnage de Mémé Yvonne (qui a de lourdes ressemblances avec le Professeur Tournesol) donne un peu de sang neuf (oui, comme dans les séries TV… ressort classique mais souvent efficace !) et permet surtout des dialogues improbables qui pimentent un peu Des monstres au carnaval. Les illustrations de Caroline HÜE sont toujours aussi efficaces, sympathiques et bien senties ; et l’intrigue Des monstres au carnaval est bien menée, avec un rebondissement histoire de relancer la cadence et de redonner du rythme. En bref, Des monstres au carnaval est une suite bien faite, bien dosée en humour et en action : elle devrait une nouvelle fois remporter un certain succès auprès du gremlin amateur de vampires farfelus et de monstres plus amusants qu’effrayants ! (Sans oublier que le graphisme est parfaitement adapté aux jeunes lecteurs et idéal pour changer des BD.)

Sa grand-mère apparaît alors sur la terrasse de la maison. C'est une vieille femme petite et trapue qui ressemble à une bouche d'incendie. Elle porte des lunettes qui lui donnent de gros yeux de hibou.
—Ce sont les amis que tu as invités ? demande-t-elle à son petit-fils.
—Oui. Ils vont m'aider à préparer le char pour le concours du carnaval, répond Mathias.
—Vous allez au bal ? reprend Yvonne. Quelle bonne idée !
—Pas au bal, au CAR-NA-VAL, repète Potofeu.

Des monstres au carnaval - Marc CANTIN & Isabel