Brève histoire des choses : un roman tout en légèreté et drôlerie
[Carozine dévore le roman Brève histoire des choses - Jacques-André BERTRAND]6 Juil. 2015
Après ces quelques détours par la littérature jeunesse (notamment avec des BD muettes, chose dont je n'avais absolument pas connaissance jusqu'à présent) et les montagnes du Péloponnèse (que le temps passe vite quand on s'amuse !), il est temps de poursuivre notre exploration de la littérature (pour adultes, cette fois) contemporaine avec un auteur que je n’avais encore jamais lu (mais dans les oeuvres duquel je me plongerai peut-être) : Jaques-André Bertrand (un moustachu à la bouille débonnaire si l’on se fie aux photos suggérées par notre ami universel Google), auteur, notamment, de Comment j’ai mangé mon estomac. Son dernier roman en date s’intitule Brève histoire des choses… et il m’a fait doucement me bidonner (une excellente chose que je n’aie plus à emprunter le métro parisien tous les jours !). La sélection des choses en question a été faite de manière hautement subjective, de même que leur présentation, ce qui n'en est que plus délectable...!
Quoi de plus étrange que le parapluie ? De plus utile et de plus encombrant ? De plus indispensable et de plus exaspérant ? Qu’on en ait un ou qu’on en ait pas. Bien qu’il ne date pas de la dernière pluie, le parapluie est tout de même assez récent. Notre grand-père Cro-Magnon n’en avait pas. Du moins n’a-t-on jamais retiré d’aucun chantier de fouilles archéologiques le moindre squelette de parapluie. Il n’avait pas encore été inventé. On n’en avait pas ressenti l’urgence. Sans doute qu’à l’époque, la pluie ne gênait pas comme aujourd’hui. Brève histoire des choses - Jacques-André BERTRAND
Brève histoire des choses : pas de résumé pour un roman qui n’en est pas vraiment un
Le problème majeur de cet ovni littéraire qu’est Brève histoire des choses est qu’il n’est pas des plus simples d’en faire un résumé. Et pour cause : Jacques A. Bertrand saute d’objet en anecdotes avec virtuose, finesse et légèreté… mais sans fil conducteur. Comment trouver un lien logique entre l’ascenseur et l’ordinateur, si ce n’est la gardienne de son immeuble ? Je me contenterai donc de dire que Brève histoire des choses est un roman plutôt inclassable qui, comme son titre l’indique si bien, évoque les choses du quotidien, que nous utilisons sans plus vraiment y penser et qui, pourtant, ont bel et bien une histoire, un passé… Bon, évidemment, il faut bien une exception à cette présentation un poil simpliste : le fond sonore mentionné dans les derniers chapitres n’est pas tout à fait un objet, bien qu’il emplisse notre quotidien. Passons. Avec une belle écriture fluide et érudite, Jacques A. Bertrand s’attarde sur le parapluie, le rond-point, le barbecue, ou encore la poche (qui n’a rien à voir avec la poche bordelaise mais consiste bien en ce trou amélioré dont sont pourvus nos pantalons), l’aspirateur, le cadenas… la liste est longue, variée et l’approche ludique. Brève histoire des choses est un roman ponctué d’humour (comment ne pas sourire devant « Rien ne raconte mieux l’Homme et le Progrès que le parapluie. Il est vrai que rien, non plus, ne s’oublie aussi facilement (…) » ?), de petites piques glissées discrètement au détour d’une anecdote (comme celle d’Einstein qui possédait deux parapluies pour n’en oublier aucun mais, par peur d’en avoir deux au même endroit, décidait de sortir sans) dont l'Histoire est plus ou moins vérifiable… Jacques A. Bertrand se moque gentiment de nos petits travers, de nos habitudes souvent ridicules, des modes non moins risibles… Le tout avec légèreté. Entre deux anecdotes, Brève histoire des choses évoque le gigot de rhinocéros (dans une vision toute personnelle de la Préhistoire), Euclide et ses lignes droites, Blaise Pascal et Archimède, Rabelais ainsi que Voltaire, Théophraste Renaudot… et le fil de l’aspirateur qui ne s’enroule jamais. Etre érudit sans en avoir l’air, voilà qui avait de quoi me plaire ! Brève histoire des choses se dévore d’une seule traite, le temps de savourer une bonne rasade d’humour et de retrouver les balbutiements du thermomètre avec le « Hollandais Fahrenheit » (bien que, théoriquement, il était Allemand) et le Suédois Celsius.
C’est le chapeau qui fait l’Homme. Sans chapeau, l’homo sapiens sapiens n’est qu’une espèce de singe nu, un mélèze en hiver, un pied de champignon. Il attrape des rhumes de cerveau. Et des coups de soleil. Les averses de grêle lui martèlent le caillou. Ebloui par l’astre solaire bas sur l’horizon, il trace ses sillons de travers. De plus, il n’a rien à soulever pour saluer les dames ou pour balayer la poussières devant les majestés. Brève histoire des choses - Jacques-André BERTRAND
Mais un jour, après quelques millénaires relativement tranquilles -bien que sans congés payés ni réduction du temps du travail-, un chef ou un sous-chef de la tribu des Enarchs (dont les futurs descendants fonderaient l’Ecole normale de l’administration) se plut à imposer un sens giratoire. Ce fut l’occasion de nombreux palabres, voire de vive protestations, mais, en l’absence de syndicats organisés, le giratoire fut décrété. Brève histoire des choses - Jacques-André BERTRAND
Longtemps, je me suis couché(e) de bonne heure... pour lire. So what?!
Autres lectures de Carozine : Miniaturiste : un roman envoûtant qui plonge dans le coeur d’Amsterdam et, en jeunesse, pour les petits dès 3 /4 ans, l'album illustré et muet Anuki, tome 5, Grand-Pied.