Mon frère est un super-héros : du roman jeunesse déjanté qui carbure aux étoiles

« — Clark ? Mais que faites-vous ici ? – Oh, je suis navré, Lois. Je ne pensais pas que vous seriez au lit si tôt. — C’est… Ce n’est pas grave. Vous m’avez surprise, c’est tout. — J’ai vu votre article. Félicitations. Perry doit être aux anges. C’est surprenant que Metropolis soit constamment menacée… — C’est le cas depuis l’arrivée de Superman. » Ah ! Je vous le donne en mille ! oui, oui. Un dialogue entre celle qui aura été la plus grande cruche des comics (et séries TV), Lois Lane, et celui qu’un peu de gomina et une paire de lunettes foireuses différencie de Superman, Clark Kent. On pourrait s’en tartiner le f*** ? Oui, probablement. Mais c’est une façon comme une autre d’introduire le sujet de la chronique du jour (bonjour) : le roman jeunesse Mon frère est un super-héros, de David Solomons (accessible aux jeunes lecteurs, dès 9 ans). Qui, comme son nom l’indique, parle effectivement de super-héros, de comics et autres super-pouvoirs.

Mon frère est un super-héros. Ça aurait pu tomber sur moi, sauf que j’ai eu envie de faire pipi.
Je m’appelle Luke Parker, j’ai onze ans et je vis dans un quartier tranquille de Londres avec ma mère, mon père et mon grand frère, Zack. Mon frère n’a pas toujours été super-héros, mais avec un nom comme Zack, c’est à se demander si mes parents n’avaient pas le pressentiment qu’il finirait un jour avec un masque et une cape, à sauver des orphelins dans des bâtiments en flammes. Zack, ce n’est pas un nom, c’est un bruitage. Mon frère est un super-héros - David SOLOMONS

Mon frère est un super-héros : deux frères et un seul destin de super-héros

Par une charmante soirée, Luke, 11 ans, dévore des comics dans la cabane perchée sur l’unique arbre du jardin familial en compagnie de son grand frère, Zach, 14 ans… quand une envie subite et irrépressible de faire pipi le tenaille. Il descend la corde à l’aveuglette, mais, quand il remonte, il sent immédiatement qu’il y a du changement dans l’air : Zach le regarde étrangement et lui annonce abruptement qu’il a des super-pouvoirs. Quézaco ? Ouais. Comme ça. Le temps que Luke fasse pipi, l’homme vert prénommé Zorbon le Décideur a débarqué dans sa soucoupe volante, en provoquant une tempête d’éclairs, a pointé son doigts sur Zach et lui a dit que, dans la mesure où la cabane se trouvait à l’exacte intersection entre son monde et celui des humains, il revenait à lui, Zach, puisqu’il se trouvait là, de sauver leurs deux mondes d’un terrible désastre : Némésis. Pour ce faire, Zorbon le Décideur a accordé six super-pouvoirs à Zach. Lesquels ? Aucune idée. Tout ça pendant que Luke faisait pipi ? Damned ! Zorbon s’est planté de frangin. C’était à lui, le roi du comics, le prince des super-héros, l’as des super-pouvoirs, d’être choisi pour cette périlleuse mission. Enfin, en attendant, il faut bien 1) trouver de quels pouvoirs Zach a été doté (la kinestésie apparaît plutôt rapidement) 2) lui préparer un costume parce qu’il est bien connu qu’un super-hréos doit avoir un masque et une cape (quitte à en faire une dans les rideaux des toilettes) 3) lui trouver un nom et Star Mec semble tout indiquer car libre de tout droit et 4) utiliser ces super-pouvoirs pour faire le bien (et non éplucher les pommes de terre). Les choses se compliquent un poil quand Star Mec arrête un bus en folie et que Lara Lee (petite soeur maligne de l’exquise star du lycée Cara Lee dont Zach est amoureux) décide de démasquer Star Mec… avec l’aide de Luke et de son ami Sergio (passionné de nourriture). Oups.

En douceur, Zack a fait redescendre le bus au sol. Mais toutes ces acrobaties étaient trop extrêmes pour le vieux véhicule : ses articulations ont laissé entendre un gémissement et ses suspensions se sont affaissées. Dans un soupir qui ressemblait à un souffle d’agonie, les portes hydrauliques se sont ouvertes et les passagers ont émergé sur des jambes flageolantes, étourdis mais parfaitement indemnes. Mon frère est un super-héros - David SOLOMONS

Mon frère est un super-héros : un roman à l’humour ravageur et une intrigue inspirée de comics

David Solomons a été comparé à Roald Dahl et René Goscinny… j’aurais tendance à dire que « tout de même pas ». En revanche, il est certain que David Solomons a du style, de la verve, un style qui dépote. Et ce n’est déjà pas si mal. Mon frère est un super-héros s’appuie sur la trame classique de l’anti-héros, de l’homme de l’ombre qui aide le super-héros de l’histoire à accomplir de grandes choses (et sa destinée, pendant qu’on y est). Luke est un garçon qui n’a pas le neurone dans le même sabot, qui s’intéresse à mille choses (et surtout aux comics), qui a une imagination plutôt débridée et qui se trouve confronté à un problème de taille : ce couillon de Zorbon n’a pas choisi le bon frère. Avec un humour ravageur, David Solomons aborde donc le thème des rivalités fraternelles, de la jalousie, de la famille, des émois adolescents et, par le biais des super-pouvoirs qu’il faut dompter et apprivoiser, de la puberté. Alors, oui, Luke est attachant et le duo qu’il forme avec Lara Lee est plutôt explosif. L’intrigue ? Menée tambour battant, elle ne manque pas de rebondissements qui passionneront les jeunes lecteurs… d’autant qu’elle est truffée de références aux super-héros qui les font tant rêver (et qu’elle possède, comme tout bon comic, son super-méchant). Qui de Batman ou de Superman serait le grand vainqueur d’un duel ? Quelle est la seule chose qui effraie Galactus ? Qui gagnerait une course, de Flash ou Superman ? Et surtout : quel super-héros digne de ce nom aurait l’audace de se balader sans cape ? Hein ?! Je vous le demande ! David Solomons maîtrise le sujet des comics et de la culture geek. Certaines scènes sont juste hilarantes et la visite dans la demeure de Christopher Talbot restera dans les mémoires. Néanmoins, Mon frère est un super-héros souffre de certains défauts qui calmeront l’ardeur des adultes : à force d’humour, David Solomons en oublie un peu la psychologie et on peut (un peu trop) aisément le lire en oubliant son neurone dans un placard à balais. Cependant, l’exubérance, l’action et l’humour estompent allègrement ces défauts. Mon frère est un super-héros est un roman jeunesse qui devrait plaire aux jeunes lecteurs (dès 9 /10 ans) et leur montrer que l’on peut être un super-héros tout en restant soi-même (et malgré un grand frère ultra pénible). Vous pouvez difficilement vous planter en l’offrant à un gamin un peu futé, qu'il soit ou non un grand lecteur, fan de comics.

J’ai acquiescé. C’était un plan qui tenait la route. Je savais qu’il y aurait des obstacles sur le chemin. Je me préparais à des objets piégés, à une milice de robots et à des tours de guet avec projecteurs. Mais la première difficulté a surgi plus tôt que je l’escomptais, ce même après-midi, aux grilles de l’école.
—Mais papa…
—Ne discute pas, on rentre à la maison. Mon frère est un super-héros - David SOLOMONS