La saga des émigrants 2 : La traversée
Carozine poursuit la lecture des épopées de nos petits Suédois

Que vous reste-t-il à faire quand la SNCF oublie d'accrocher une locomotive à votre train et que vous vous retrouvez bloquée pendant deux heures en gare de Bordeaux ? Que, évidemment, vous vous retrouvez coincée dans votre compartiment avec un effroyable bavard et que vous devez ensuite supporter plus de cinq heures de train ? Lire, bien sûr ! Et quoi de mieux, un jour de voyage, que de vous plonger dans La saga des émigrants, tome 2 (de Vilhelm Moberg), retraçant la grande traversée de nos émigrants suédois ? En route donc pour la suite des aventures de nos Suédois, découverts dans La saga des émigrants [1] : Au pays. Larguez les amarres, fermez les écoutilles ! Les pages de La saga des émigrants [2] : La traversée vous feront vivre l'épopée des paysans suédois dont la tête est remplie de rêves d'Amérique.

La saga des émigrants [2] : une traversée longue et périlleuse

Nous retrouvons donc nos personnages sur le quai de Karlshamn (en Suède, n'est-il pas), en train d'embarquer à bord de la Charlotta, vieux mais robuste voilier destiné à leur faire traverser l'Atlantique pendant de longues semaines, vers leur terre promise : les Etats-Unis d'Amérique. Derrière la barre : un vieux loup de mer grincheux, le capitaine Lorentz, n'appréciant que très moyennement sa nouvelle cargaison : car qu'il y a-t-il de pire que de transporter des humains ?! Ils emportent leur maison dans leurs lourdes malles (voire même leur meule de pierre !), râlent pour tout et n'importe quoi comme cet homme au grand nez digne d'une péninsule (Karl Oskar, pour ceux qui auront suivi les aventures du tome 1 de La saga des émigrants) et se reproduisent tels des lapins. Vraiment, le capitaine Lorentz a de quoi maugréer ! Du côté des passagers, la vie s'organise sur ce bateau pas bien large. La traversée sera longue et pénible pour ces hommes de la terre, qui ne voient dans la mer qu'un bien triste moyen de parvenir à leur rêve... pour certains, cette vaste étendue bleue fourbe et capricieuse (ce que, en digne fille de marin, je ne peux certainement pas valider) deviendra leur demeure éternelle... la terre promise n'est pas donnée à tout le monde et se mérite ! Mais surtout les conditions de cette éprouvante traversée sont particulièrement difficiles.

Le capitaine de la Charlotta était un petit homme de soixante ans au visage laid, au nez épaté, aux yeux exorbités et au teint rougeaud. Sa large bouche rentrée sous son menton en galoche ressemblait étonnament à celle d'un gros brochet. On aurait dit qu'il allait mordre, lui aussi. Au milieu de cette gueule était enfoncée une pipe. Cela faisait près de cinquante ans qu'il vivait en mer et près de dix qu'il était à la tête de ce vieux bateau à voiles, qui était son véritable foyer.La saga des émigrants 2 : La traversée - Vilhelm MOBERG

La saga des émigrants [2] : une plongée historique dans le quotidien des émigrants

Vilhelm Moberg est toujours aussi bien documenté : La saga des émigrants [2], La traversée est un puits de connaissances puisées de-ci de-là dans le journal de bord et autres archives déterrées par l'auteur suédois. Au gré des personnages, Vilhelm Moberg nous présente le quotidien des émigrants au cours de cette longue traversée de l'Atlantique. La saga des émigrants [2] : La traversée s'attache à nous faire revivre, avec force détails, l'épreuve de nos petits émigrants bien courageux venus du fin fond de leur Suède natale. Entre les maux de mer, les poux, le scorbut, le lard rance et trop salé, le manque de place, La saga des émigrants [2] : La traversée retrace un épisode historique de façon nettement moins glamour que ne le fit le Titanic de James Cameron ! Vilhelm Moberg se met dans la peau de chaque personnage pour nous offrir une nouvelle facette de cette traversée pénible et dangereuse. Kristina qui s'affaiblit de jour en jour et perçoit la Charlotta comme sa tombe, tout en maugréant contre sa proximité forcée avec la catin Ulrika, convertie depuis peu et se pavanant drapée dans sa nouvelle foi ; Inga-Lena, la femme dévouée du sauveur réincarné (ou presque), perdant la santé à force de vouloir arriver à la hauteur de son bien-aimé mari, complètement déconnecté de la réalité et plongé dans ses contemplations ; Robert, le petit frère de Karl Oskar, éperdu d'admiration devant la fille d'Ulrika, Elin, et tentant désespérément d'apprendre l'anglais sans bien saisir le système de la phonétique ; l'Américain, mythomane divertissant les émigrants de ses péripéties rocambolesques… La saga des émigrants [2] : La traversée est une plongée captivante dans la vie et les pensées de chacun de ces Suédois lancés à la poursuite de leurs rêves. Les pages écrites par Vilhelm Moberg se tournent toujours aussi rapidement, mêlant habilement archives et romance : un régal !

Lorsque le vent soufflait en tempête, c'était un paysage accidenté dont les bosses n'arrêtaient pas de bouger. Par beau temps, sous les rayons du soleil, on aurait dit un immense tapis de soie ou de satin bleu sur lequel passer la main. La nuit, la lune traçait à sa surface de larges avenues de lumière qui semblaient attendre des anges venus du ciel. A terre, une montagne ou une colline restait toujours à la même place et était semblable à elle-même chaque fois qu'on passait à côté. La mer, elle, était toujours différente.La saga des émigrants 2 : La traversée - Vilhelm MOBERG