26
Fév.
2016
Hector et les Pétrifieurs de temps : du roman jeunesse qui swingue
[Carozine dévore le roman Hector et les Pétrifieurs de temps - Danny WALLACE /illustrations de Jamie LITTLER - dès 9 ans]
En cette veille de week-end (avec le tiret… chacun son combat !), et par cette belle journée ensoleillée (du moins, pour l’instant), je retourne à la littérature jeunesse avec un roman qui dépote sous la cafetière et devrait remporter un franc succès auprès de votre gremlin (dès 9 ans) : Hector et les Pétrifieurs de temps, livre pondu avec un humour décapant par Danny Wallace (que vous connaissez peut-être grâce à Yes Man) et rendu franchement fun graphiquement parlant grâce à l’imagination délirante de l’illustrateur Jamie Littler. En toute honnêteté, je suis toujours surprise par la richesse de la littérature jeunesse, dont je découvre l’étendue depuis quelques temps. Qui aurait cru que cela ne se limitait pas à Harry Potter ?! Vous me direz, c’est un peu comme si on supposait que la littérature russe se limitait à ce bon vieux Tolstoï. Ce serait diablement réducteur. Et imaginez un peu la tronche du formidable Fiodor (Dostoïevski… l’un de mes chouchous). Je m’égare. Je disais donc que ce détour en littérature jeunesse avec le roman Hector et les Pétrifieurs de temps est franchement cocasse et jubilatoire, donc profitons !
—Qui peut me parler de l’érosion des sols ?
Les élèves s’étaient sentis accablés. Connaissez-vous un sujet plus ennuyeux que l’érosion des sols ? Moi, non. M. Longbêta étaient un de ces professeurs particulièrement soporifiques, doués d’un talent extraordinaire pour rendre les choses encore plus ennuyeuses qu’elles ne l’étaient. De ce point de vue, du moins, M. Longbêta était remarquable.
Hector avait fixé sa trousse et pris son air de « attendez, laissez-moi réfléchir ». Il avait passé la main dans son épaisse tignasse noire, que sa mère appelait le Pétard, puis il avait fermé très fort ses grands yeux marron-vert, comme s’il cherchait vraiment une réponse. Hector et les Pétrifieurs de temps - Danny WALLACE
Hector et les Pétrifieurs de temps : un temps qui se fige, un garçon plutôt débrouillard… et des Terribles
Nous sommes à Starkley, ville officiellement considérée comme la « quatrième ville la plus ennuyeuse de Grande-Bretagne », ce qui a le don de réjouir sa population très fière de son vieux pont de pierre. En cette matinée paisible, Hector Obel, 10 ans, s’ennuie ferme en classe quand, brusquement, son professeur M. Longbêta s’arrête de vociférer sur l’érosion des sols et semble se figer… Pire. Le postillon qui s’était échappé de sa bouche est littéralement suspendu dans les airs. Les doigts du gros Achille Bile, le caïd de la classe, sont bloqués dans son nez, et Hector semble être le seul à ne pas être pétrifié. Malédiction ou chance exceptionnelle ? Hector aura le temps de se poser la question, car les Pauses deviennent de plus en plus fréquentes et s’allongent considérablement. À qui pourrait-il en parler ? Depuis la disparition de son père (qui lui a laissé en héritage une vieille montre, surnommée L’Exploratrice, qui résiste aux Pauses), sa mère est distraite et, surtout, débordée par son travail au bureau des doléances où les plaintes s’accumulent à une vitesse effrayante depuis quelques semaines. Son adolescent de frère, James, est accaparé par sa petite amie, et son ami Robin est tellement pétochard qu’il n’ose aborder le sujet avec lui. Mais, rapidement, Hector s’aperçoit qu’il n’est pas le seul à résister aux Pauses : une jeune fille dotée d’une mèche de cheveux bleue et d’un sacré tempérament est également dans la même situation… Et qu’en est-il de ces adultes qui disparaissent ou qui deviennent subitement irritables au possible ? Les Terribles, ces Pétrifieurs de temps qui débarquent à chaque Pause pour semer la zizanie dans la petite ville de Starkley seraient-ils la clé de ce mystère ? Et comment s’en débarrasser ?
Pour tout dire, ce qui était arrivé de plus extraordinaire avait été le jour où Starkley avant remporté le titre de quatrième ville la plus ennuyeuse de Grande-Bretagne. Un grand jour dans son histoire.
—Quatrième ! s’étaient exclamés les gens. On a réussi !
Une fête avait même été prévue dans la nef de l’église, mais elle avait dû être annulée, parce que quelqu’un n’avait pas rempli les bons formulaires de la commission hygiène et sécurité.
Moooortel. Hector et les Pétrifieurs de temps - Danny WALLACE
Hector et les Pétrifieurs de temps : un roman désopilant mené tambour battant
Une fois n’est pas coutume, je vais entamer cette chronique par les illustrations de Jamie Littler. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’elles nous sautent aux yeux dès que Hector et les Pétrifieurs de temps atterrit entre nos mains : elles escaladent (au sens propre du mot) les pages du roman, obscurcissent ses rebords pour venir éclabousser la couverture au jaune pétaradant d’Hector et les Pétrifieurs de temps. Vous vous doutez bien que si des illustrations ont le culot de s’afficher sur les rebords d’un livre, elles n’auront aucune honte à s’infiltrer entre les pages d’Hector et les Pétrifieurs de temps : elles investissent le roman et le transforment en un objet un peu spécial. Jamie Littler semble avoir une imagination aussi débridée que celle de l’auteur et c’est parfait : ses dessins sont expressifs, vivants et s’adaptent parfaitement au texte de Danny Wallace. Et justement, venons-en au texte. Avec Hector et les Pétrifieurs de temps, Danny Wallace laisse libre court à son imagination fertile, à son humour décapant et Hector et les Pétrifieurs de temps en devient carrément jubilatoire. Le ton est donné dès les premières pages, où s’étalent les actualités soporifiques de la ville de Starkley… et le reste d’Hector et les Pétrifieurs de temps est un festival qui ne trouve de pause qu’à la dernière page du roman. L’intrigue est menée à un rythme enlevé, évolue sans cesse entre énergie bouillonnante, émotion et action brute, tout en abordant des sujets loin d’être superficiels (comme l’abandon, le harcèlement à l’école, les relations fraternelles que l’adolescence rend parfois bien complexes…). L’écriture ? Accessible sans être crétine : épatant. Ajoutez à cela que Danny Wallace nous livre juste ce qu’il faut d’éléments en fin de roman pour nous faire trépigner d’impatience et espérer une suite, et vous obtenez le cocktail parfait. Hector et les Pétrifieurs de temps fait preuve d’un univers sympa, d’une imagination délirante qui ravit, d’un ton espiègle qui dépote (mention spéciale aux insultes, le Capitaine Haddock n’a plus qu’à bien se tenir) : il s’agit là d’un roman qui se dévore, qui devrait en faire rire plus d’un parmi les bambins… Et quand ça dépote, j'aime ça.
—Robin, commença Hector, un peu gêné, je peux te poser une question ?
—Est-ce que je connais la réponse ? s’enquit-il avec anxiété. Parce que sinon je ne préfère pas.
Robin était un enfant anxieux. Il n’aimait pas qu’on lui pose des questions s’il n’était pas absolument sûr de la réponse. Ce qui limitait les sujets de conversation. Par exemple, il ne fallait rien lui demander en maths, en histoire ou en sciences.
En anglais, en français ou en géographie.
Il ne fallait rien lui demander sur le jardinage.
Ni sur les têtards ou sur l’espace.
Ni sur les épinards. Hector et les Pétrifieurs de temps - Danny WALLACE
Longtemps, je me suis couché(e) de bonne heure... pour lire. So what?!
Autres lectures de Carozine : Enola & les animaux extraordinaires, 2, La licorne qui dépassait les bornes : BD futée pour enfants amateurs de fantastique.