Les insultes du capitaine Haddock : écornifleur... bougre de faux jeton
19 Avr. 2011
Soufflée par la fumisterie (et pas des moindres !) que fut son déménagement, les jurons manquèrent à l'appel de la bouche d'ordinaire fort prolifique de Caro(z)ine et le verdict fut le suivant : il est grand temps de se replonger dans les insultes du brillant Capitaine Haddock car mille millions de mille milliards de mille sabords, il faut bien savourer une infime vengeance ! Attaquons-nous donc au juron (que j'ai décrété) fétiche du Capitaine Haddock "écornifleur", auquel je me ferai un plaisir d'adjoindre un petit "bougres de faux-jetons à la sauce tartare", qui, bien qu'il ne m'aidera pas à me faire rembourser, détend bigrement et me réjouit rien qu'à le prononcer. Je suis persuadée que l'abrutie de secrétaire avec laquelle j'ai bataillé au téléphone en aurait eu la chique coupée si je lui avais vociféré dans les tympans un savoureux "bougre de faux jetons à la sauce tartare, vous vous êtes trompés de devis ; vous n'êtes qu'une bande d'écornifleurs !". Avec le recul, cela me fait jubiler.
Ecornifleur : le coeur même du métier de déménageur ?
L'acte I de ma vengeance sera donc de vous dévoiler l'âme sombre et sordide de l'écornifleur éructé par le bon vieux Capitaine Haddock et qui sied diablement bien à cette société de déménagement. Un écornifleur est tout bêtement une personne qui profite d'une situation... que dis-je ?! Un goujat qui se procure par la ruse et le vol de quoi subvenir à ses besoins. Et avouez qu'un simple "parasite" ou "pique-assiette" est d'un banal affligeant. Notre cher La Fontaine a affublé le pauvre et affamé renard de ce nom, dans sa fable Les deux Rats, le Renard et l'Oeuf (livre IX – fable 20) ; ce qui ne pouvait que lui pendre au nez, me direz-vous, puisque ce fieffé renard aurait certainement cherché à subtiliser l'oeuf si chèrement acquis si les deux rats n'avaient pas trouvé une ingénieuse solution pour le porter. Mais trêve de tergiversation fabuliste et revenons à notre barbu rouspéteur. L'écornifleur du Capitaine Haddock peut également être assimilé au plagiaire : vous savez, ces personnes cherchant à s'enrichir en vendant comme esclaves des personnes libres ou en détournant les esclaves de leur voisin pour les revendre à leur propre compte ? Bingo ! On reste donc dans la même veine d'escroquerie, filouterie et autre friponnerie.
Ecornifleur... Bougres de faux-jetons !
Mais quitte à rester dans le lexique de l'arnaque, autant y ajouter le très amusant "bougre de faux-jeton à la sauce tartare". Car le faux-jeton est une personne fourbe, roublarde et menteuse. "Pourquoi donc ?" semble être la question qui vous brûle les lèvres... Facile, Emile : il y a quelques décennies, du temps où Exacompta n'avait pas encore conçu ses perpétuels de caisse et Casio (et ses calculatrices) végétait à l'état de spermatozoïde, figurez-vous que les commerçants utilisaient des planches sur lesquelles ils disposaient des jetons, en de savantes colonnes, pour faire les totaux. Ces jetons pouvant ressembler à s'y méprendre à de vraies pièces de monnaie, il arrivait qu'un malappris les utilise auprès de naïves personnes (des ravis de la crèche, oui). Reste le mystère de la sauce tartare, n'est-il pas, Docteur Watson ? Pourquoi diable une personne fausse comme un jeton serait-elle agrémentée de sauce tartare ? Ceci est une vaste question dont le Capitaine Haddock ne m'a pas encore fourni la réponse, mais peut-être avait-il un souvenir d'enfance particulièrement traumatisant concernant la sauce tartare, un peu comme un paquet de têtes blondes avec les choux de Bruxelles et autres langues de boeuf en sauce peu alléchante.
Bougres de faux jetons à la sauce tartare ! C'est tout ?!
Autres expressions avec Carozine : Le louchébem, jargon des bouchers