Je me tuerais pour vous : des nouvelles de Fitzgerald revenues d’entre les morts
[Carozine dévore le roman Je me tuerais pour vous - Francis Scott FITZGERALD]
J’ai le neurone amorphe à force de mal dormir… Merci la chaleur puis les orages (ah ! Le charme indéniable de vivre sous les toits), sans omettre les gens fortement enivrés qui se demandent en hurlant, à 4h du matin, où sont leurs pompes (ça, une pique spéciale Epicuriales, juste histoire de faire ma mauvaise tête). Mais passons ! Entre deux averses, je me suis dit que c’était le jour parfait pour vous parler de ma dernière lecture en date : Je me tuerais pour vous de Francis Scott Fitzgerald. Des nouvelles pas tout à fait comme les autres puisqu’il s’agit de nouvelles n’ayant jamais été publiées jusqu’à ce jour. Forcément, il ne m’en fallait pas plus pour être attirée comme une abeille sur le pot de miel de Winnie. (Ce qui me donne formidablement envie d’un sorbet citron - miel de châtaignier façon Fabrique Givrée, mais passons. Pour une fois, je vais tenter de faire une introduction qui maintienne un lien avec la choucroute. Tenter.) Donc voilà, c’est avec un plaisir immense que je me suis plongée dans de nouvelles pages pondues par F. Scott Fitzgerald… (Et, truc de dingue, c'est un roman que j'ai payé, dis donc.)
Ce n’est pas mon vrai nom que vous lisez ci-dessus —celui auquel il appartient m’a donné la permission de l’utiliser pour signer ce texte. Je ne divulguerai pas le mien. Je suis éditeur. Je publie de longues histoires d’amour écrites par de vieilles filles du Dakota du Sud, des romans policiers qui parlent de riches hommes du monde et de femmes apaches dotées de « grands yeux noirs », des travaux sur telle ou telle menace ou sur la couleur de la lune à Tahiti, rédigés par des universitaires et autres chômeurs. Je me tuerais pour vous - Francis Scott FITZGERALD
Je me tuerais pour vous : des psychiatres, des jeunes filles en fleur pleines de ressources et bien d’autres
S’agissant de nouvelles, il est un poil délicat de résumer la chose. Sachez cependant qu’entre les pages de Je me tuerais pour vous, vous rencontrerez les trois frères Wood, internés en hôpital psychiatrique après avoir perdu les pédales suite à la débâcle économique de 1929 (l’un se prend pour un chef de gare, l’autre pour un coiffeur et le dernier est persuadé ne parler qu’exclusivement espagnol), et que leur aîné s’apprête à rejoindre pour cause de paranoïa aiguë. Vous croiserez également un éditeur vénal dans toute sa splendeur qui vient de publier à grand renfort de marketing le dernier opus de son spécialiste de la vie dans l’au-delà… sauf que, manque de bol, le neveu prétendument mort dans le roman se retrouve assis dans le train, en face de notre éditeur qui n’en mène pas bien large. Vous croiserez également une starlette holywoodienne venue escalader une colline sous les projecteurs et qui fait la rencontre d'un véritable bourreau des coeurs... entre autres.
Puis-je dire d’entrée de jeu qu’à mon avis, rien de tout cela ne s’est vraiment passé ? L’histoire est trop grotesque et je n’ai jamais pu découvrir exactement où elle avait eu lieu ni réussi à identifier les différents acteurs par leurs vrais noms.
Dans un coin plaisant du New Hampshire, sur une colline blanche en hiver et verte en été, on aperçoit une grappe de quatre ou cinq maisons. Par un après-midi de printemps, il n’est pas rare que les portes et les fenêtres de la plus grande et la plus élégante d’entre elles s’ouvrent largement sur les courts de tennis. Je me tuerais pour vous - Francis Scott FITZGERALD
Je me tuerais pour vous : des nouvelles mélancoliques mais inégales
Je disais donc que j’étais franchement conquise d’avance, bien avant de découvrir les premières pages du livre Je me tuerais pour vous. Et pourtant… Alors peut-être que j’en attendais trop. Peut-être que j’espérais encore plus de l’auteur du recueil de nouvelles Un diamant gros comme le Ritz (entre autres, hein… je ne vous ferai pas l’affront de vous citer les plus célèbres, tout de même !). Et cela semble incroyablement présomptueux de dire cela de Francis Scott Fitzgerald, mais j’ai été un poil déçue par Je me tuerais pour vous. Et je suis officiellement embarrassée de le reconnaître. J’ai l’impression d’être une vraie pisseuse. J’ai envie de plonger ma tête dans le sable. Mais voilà. J’ai retrouvé avec plaisir l’écriture fluide et érudite de Francis Scott Fitzgerald, mais les nouvelles étaient de qualité plutôt inégales. Certaines nouvelles de Je me tuerais pour vous sont lumineuses, éblouissantes et de petits régals de lecture (notamment la nouvelle éponyme, mais également « La perle et la fourrure », « Salut à Lucy et à Elsie »), il est juste dommage que ce ne soit pas le cas pour l’intégralité des nouvelles. Il n’en reste pas moins que Francis Scott Fitzgerald est un immense conteur d’histoires ; il a sublimé l’art de la nouvelle et je suis toujours autant réjouie par les pirouettes finales qu’il nous propose. Et cela estompe la déception. Je me tuerais pour vous est un recueil empreint de cette mélancolie propre à F.Scott Fitzgerald, spécialiste de la solitude, du désespoir, de l’ironie mordante et de la jeunesse sans avenir perdue dans les nimbes de la Grande Dépression (du moins dans ce recueil). On retrouve dans Je me tuerais pour vous des soupçons autobiographiques éparpillés comme des éclats de verre… Fondamentalement, j’ai adoré me plonger dans cette prose légère et cruelle que j’apprécie tant chez Fitzgerald, ce qui fait que Je me tuerais pour vous n’est peut-être pas un immense coup de coeur, mais je ne regrette pas d’avoir passé du temps entre ses pages.
La jeune fille flanaît sous le ciel rose en attendant qu’il se passe quelque chose. Ce n’était pas une personne de nature rêveuse, mais ce soir-là, elle l’était : ce crépuscule si particulier semblait nouveau pour elle, enfin presque, après toutes ces années passées dans les pays lointains. De drôles de lignes noires se dessinaient dans les arbres, il y avait aussi de petits insectes bizarres, les premiers cris nocturnes d’étranges petites bêtes commençaient à se faire entendre. Je me tuerais pour vous - Francis Scott FITZGERALD
Les détails du livre
Je me tuerais pour vous
Auteur : Francis Scott FITZGERALD
Traducteur : Marc AMFREVILLE (I'd die for you)
Éditeur : Grasset /Fayard
Prix : 23 €
Nombre de pages : 480
Parution : 29 mars 2017
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Longtemps, je me suis couché(e) de bonne heure... pour lire. So what?!
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